La Lutte contre l’étalement urbain

L’étalement urbain est l’augmentation de la superficie d’une ville, et la diminution de sa densité de population. Il est l’une des manifestations spatiales de la périurbanisation (extension des surfaces artificialisées en périphéries des agglomérations urbaines ).

L’accroissement démographique des grandes aires urbaines s’accompagne de phénomènes d’étalement des cités sur les espaces périphériques, phénomènes favorisés par la mise à disposition de systèmes de transport individuels ou collectifs. L’étalement urbain peut correspondre à ce que les anglophones désignent sous le nom d’ « urban sprawl », expansion urbaine, qui peut comporter une connotation négative pour désigner un mode d’expansion de la tache urbaine plutôt anarchique et peu contrôlé. L’étalement peut prendre plusieurs formes : on parle de tache d’huile pour un étalement concentrique, de doigts de gant lorsque l’urbanisation suit les axes de transports, et de mitage pour des formes urbaines plus éparpillées. L’une des réponses apportées à l’étalement urbain est la densification. (D’une manière générale, la densification est l’augmentation du nombre d’habitants par kilomètre carré dans un espace donné).

École normale supérieure de Lyon

(coll.) 2010, 2019,2020., http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/etalement-urbain-urban-sprawl-expansion-urbaine

En Europe ce n’est qu’à partir des années 1950 que le phénomène prend de l’ampleur, pour s’accélérer aujourd’hui. A l’échelle européenne l’expansion spatiale des villes est rapide : 5,4 % sur 10 ans (8 000 km2), soit trois fois la superficie du Luxembourg. Les zones les plus concernées sont la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie du Nord, l’Allemagne, l’Irlande, le Portugal, l’Ile-de-France, la région madrilène et le littoral. Depuis le milieu des années 1950 la population des villes européennes a augmenté de 33 % tandis que leur surface s’accroissait de 78 %.

European Environmental Agency, Urban Sprawl in Europe, 2006

Les problèmes engendrés par l’étalement urbain sont à la fois économiques, sociaux et environnementaux.

Tout d’abord, Il vient en concurrence directe avec les productions agricoles alimentaires, d’autant plus qu’il se fait d’abord au détriment de l’agriculture urbaine et périurbaine qui représente 50 % de la valeur ajoutée agricole et les plus proches des centres de consommation, l’étalement urbain met en cause la possibilité de développer des circuits courts.

Par ailleurs, il faut veiller à raccorder ces nouveaux lotissements aux services publics comme l’égouttage, l’eau, l’électricité,… et il entraîne des coûts accrus en terme de voirie.  Au plus l’étalement urbain est conséquent, au plus le besoin de voitures individuelles est conséquent.  Ce qui amène à de nombreux problèmes de congestion, mais aussi d’isolement si les habitants n’ont pas les moyens de se payer une voiture.

La maîtrise de l’étalement urbain a été affirmée comme un objectif politique fort dans des traités internationaux (convention alpine), dans la loi (loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain) et dans la soft law charte de Leipzig sur la ville européenne durable (stratégie nationale de développement durable, stratégie thématique de l’Union européenne pour l’environnement urbain).

Plusieurs pays ont déjà mis en place des politiques pour faire face au phénomène de l’étalement.

L’ Allemagne s’est fixée, en 1997, un objectif de division par dix de la consommation annuelle d’espace naturel.

Les Pays-Bas, ont institué la politique ABC (Accessibility profile of urban location), favorisant la ville compacte, la densification, la combinaison des politiques de construction et de transport et la localisation dense des activités à fort flux à proximité des transports collectifs.

En Grande-Bretagne, les Planning Policy Guidance fixent aux autorités locales un cadre global pour augmenter la densité, freiner l’étalement et les commerces en périphérie.

La Flandre (2040) et la Wallonie (2050) tendent vers la fin de l’étalement urbain.

C’est une révolution !

En Belgique jusqu’ici, la construction ne s’est pas démarquée par un souci de modération. En l’absence de restrictions, l’appétit des Belges pour les villas quatre façades loin des nuisances des villes a favorisé l’étalement urbain. Si le nord du pays est davantage touché par cet étalement, le sud n’en est pas moins épargné.

Le « stop au béton » belge s’insère dans un processus de transition

Il était temps, puisque la Belgique arrive en tête des classements européens mesurant l’étalement urbain et la part du territoire artificialisé, derrière les Pays-Bas.

En Région flamande …

Le « stop au béton » est lancé dans un premier temps par la Région flamande, en décembre 2016, en l’inscrivant dans son plan d’aménagement du territoire. La Flandre est largement urbanisée puisque 32,6 % de son territoire est construit. Et cette tendance se poursuit au rythme de six hectares vierges disparaissant quotidiennement. [1]

Conscientes de l’enjeu, les autorités ont décidé de protéger les espaces non artificialisés. Sur les 72 000 hectares encore enregistrés au plan de secteur en zone urbanisable, deux tiers changeront de statut. D’ici 2040, la Flandre ne devrait donc plus compter que 24 000 hectares constructibles.

Le gouvernement flamand a conclu un accord politique sur le betonstop, désormais appelé bouwshift. Les communes ont désormais jusqu’à 2040 pour définir quelles sont les zones d’expansion résidentielle à bâtir ou à laisser non bâties. Ce sont aussi les communes qui devront indemniser à 100 % les pertes encourues par les propriétaires de ces terrains

À travers ce choix, la Région flamande a décidé de travailler sur son plan de secteur.  C’est à dire sur les propriétés directement. Des dédommagements financiers ou en nature sont envisagés pour compenser les pertes chez les propriétaires enregistrant une moins-value sur leur terrain du fait du déclassement en zone non urbanisable.  Pour compenser, il serait possible de transférer la propriété d’un terrain « déclassé » vers un terrain encore urbanisable. Ce transfert de titre de propriété serait l’option préconisée par les autorités.

[1]K. Vermeiren, L. PoeLmanS, G. enGeLen, i. LoriS, a. PiSman, What is Urban Sprawl in Flanders ?,Proceedings of REAL CORP, 2018

En Région wallonne  …

Ont a décidé de travailler différemment avec le SDT.  Au lieu d’interdire et de modifier le plan de secteur.  Le gouvernement wallon a décidé de travailler sur son outil d’orientation d’aménagement du territoire.  Il va rendre plus compliqué la construction en périphérie (hors des centralités) et privilégier la construction au sein des centralités.

Certains professionnels du secteur immobilier y voient davantage un effet d’annonce de la part du monde politique. La tendance naturelle suivrait déjà cette voie. Les logements mal situés perdraient déjà de leur valeur tandis que ceux à proximité d’infrastructures, d’équipements et de transports publics en gagneraient, eux.

Dans le Brabant wallon, le marché du neuf concernerait très majoritairement les appartements et non plus les villas quatre façades. Il est vrai que lorsque la disponibilité foncière se fait plus rare, et que donc le prix des terrains augmente, la tendance va à la production d’immeubles à appartements de type clés-sur-porte dont on tire un plus grand profit. La superficie des parcelles rétrécit également puisqu’on est passé à une moyenne de 12 à 5 ares. L’intérêt se porte désormais davantage sur le logement mitoyen.[2]

Le « stop au béton », n’est pas un arrêt complet de la construction. Seulement, on visera à reconstruire les espaces en friche, les bâtiments délabrés, et même encore à bâtir sur certaines parcelles urbanisables idéalement situées. Il s’agit surtout de construire différemment.

[2]https://www.mubw.be/wp-content/uploads/sites/2/2019/12/pra%CC%83%C2%A9santation-yves-hanin.pdf

L’exemple de Munich…

L’exemple de Munich est connu. Il tire son origine de la décision prise après-guerre de reconstruire le centre historique, entouré à la fois d’une ceinture verte et d’un périphérique.

Promouvoir un développement multipolaire. Dès le début des années 1980, l’agglomération de Rennes a choisi un développement polycentrique, privilégiant la densification des bourgs anciens autour desquels sont préservées des ceintures vertes.

Cette stratégie a conduit à un modèle multipolaire, de type « ville archipel », souvent cité en exemple.

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