Les actions face au mal-être des travailleurs
Le mal être des travailleurs de l’administration de Tubize est depuis longtemps dénoncé. Des actions sont menées pour améliorer les conditions de travail. Depuis quelques mois, nous entendons parler d’enquêtes psycho-sociales au sein de la ville de Tubize. Certains remettent en cause ces enquêtes psycho-sociales. Mais la loi ne permet plus de faire n’importe quoi.
Contexte
La loi “bien-être” de 1996 oblige tout employeur à organiser une politique bien-être dans son institution. Au cours de cette dernière décennie, cette loi a été améliorée en fonction des cas de figures sans cesse en mouvement.
La loi 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail est donc complétée en 2014 par les risques psycho-sociaux, des dispositions contre la violence, le harcèlement moral et sexuel sur le lieu de travail.
Cette loi dit en substance que tout employeur se doit de mettre en place des mesures qui garantissent le bien-être des travailleurs. Il a la totale responsabilité du bien-être de ses collaborateurs.
En outre, les situations de travail doivent comporter objectivement un danger, ce qui signifie que l’expérience subjective du travailleur individuel n’est pas déterminante. Lorsqu’une situation peut être considérée comme « normale », l’employeur ne pourra être tenu responsable de la souffrance du travailleur, même si la situation est mal vécue par un travailleur compte tenu de sa subjectivité.
Risques psycho-sociaux, qu’est-ce que c’est ?
Les risques psychosociaux au travail sont définis dans la législation comme « la probabilité qu’un ou plusieurs travailleur(s) subisse(nt) un dommage psychique qui peut également s’accompagner d’un dommage physique, suite à l’exposition à des composantes de l’organisation du travail, du contenu du travail, des conditions de travail, des conditions de vie au travail et des relations interpersonnelles au travail sur lesquelles l’employeur a un impact et qui comportent objectivement un danger. »
Tous les mots de cette définition ont leur importance !
Un dommage psychique peut se caractériser par des angoisses, du stress, de la dépression, un burnout, des idées suicidaires… et un dommage physique par des problèmes de sommeil, de l’hypertension, des problèmes gastro-intestinaux
Les risques psychosociaux sont complexes car leurs causes sont multifactorielles et peuvent se situer à différents niveaux.
Ils sont néfastes tant pour le travailleur que pour l’organisation.
Pourquoi ?
Le mal-être coûte cher à la société, à l’employeur, aux collaborateurs.
Le mal-être au travail, c’est l’absentéisme dans les services et des projets ralentis voire mis sur pause. Ce sont des absences maladies longues durées.
C’est du personnel en souffrance : au sein des écoles, ce sont des enseignants démotivés, reclassage régulier des enfants chez les autres enseignants qui risquent à leur tour de voir l’enthousiasme disparaître ou de tomber malade. Cette fatigue se répercute chez les enseignants qui restent. Ce sont des écoles mal entretenues et sales, des temps de midi non surveillés, des repas de midi mal encadrés,…
C’est pareil pour tous les services mais c’est d’autant plus grave quand la responsabilité par rapport aux enfants et à la pédagogie est engagée.
Il est donc fondamental de détecter les signes avant-coureurs de mal-être et encore plus quand les signes sont déjà présents : absentéismes, maladies (souvent de longue durée, démissions en cascades,…)
Le mal-être chez un agent a des répercussions importantes sur sa vie, sa santé psychique ou physique. Et l’employeur sera automatiquement considéré comme responsable si les mesures préconisées n’ont pas été mises en places. Allant jusqu’à la pénalité financière.
Mais comment savoir si le service va mal ?
Alors, oui, ça semble couler de source surtout si la hiérarchie se dit ouverte aux remarques et plaintes. Mais le mal être est aussi très souvent ignoré parce que mis sous silence. Ou bien, le vrai problème est sous-jacent à celui qui est ouvertement identifié.
Différents outils existent qui peuvent être fournis pour détecter, analyser et répondre au mal-être par des actions sur-mesures.
Ainsi, l’analyse psycho-sociale est l’arme absolue. (aussi appelée analyse de risques. Jargon un peu hermétique qui ne parle qu’aux professionnels des ressources humaines)
L’analyse psycho-sociale
Qu'est-ce que c'est ?
Outil qui permet de mesurer le bien-être au travail sous forme de questionnaires ou d’entretiens avec les agents.
Ces entretiens ou analyses sont effectuées par des professionnels que l’on appelle les Conseillers en prévention pour les aspects psycho-sociaux (1 à 2 ans de master, c’est dire si ce type d’analyse est cadrée.)
Les analyses libèrent la parole de tous les agents sous couvert d’anonymat.
Les agents doivent en effet pouvoir s’exprimer, sans entrave ni censure, sur les dimensions concrètes de son travail.
Comment ça se passe ?
Le caractère subjectif de l’expression est fondamental puisque seul l’agent sait ce qu’il vit. Pour une même situation, un agent vivra les choses différemment de son voisin, ou un même agent pourra vivre les choses différemment en fonction de sa réalité personnelle du moment. Il s’agit donc d’une photographie qui mettra le doigt sur des situations dangereuses et apportera des pistes de réflexion et actions à mettre en place par l’employeur.
Ce caractère subjectif est la base de ce type d’analyse. Mais prenant la situation de tous les agents dans la globalité, on arrive à un résultat totalement objectivable.
Les questions seront posées et approfondies sur la situation de travail à plusieurs niveaux :
l'organisation du travail
C’est la structure même de l’organisation, la manière dont sont réparties les tâches, les procédures de travail, le style de management…
le contenu du travail
C’est la tâche qu’exerce le travailleur en tant que telle, la complexité de celle-ci, ses exigences émotionnelles (relation avec le public, contact avec la souffrance d’autrui…), la difficulté de la tâche, la charge physique de celle-ci…
les conditions de travail
Ce sont les différents paramètres qui influencent l’exécution du travail : le type de contrat ou le statut, l’horaire (travail de jour, à pause…), les possibilités de formation, d’évolution dans la carrière, les procédures d’évaluation…
les conditions de vie au travail
C’est l’environnement physique dans lequel le travail est effectué : aménagement des lieux de travail, équipements de travail, le bruit, l’éclairage, les substances utilisées, les positions de travail, l’air conditionné…
les relations interpersonnelles au travail
Ce sont les relations internes (entre collègues, avec le chef direct, la hiérarchie…), mais également les relations avec les tiers (fournisseurs, clients…), la communication…
Qu’est-ce que ça montre?
- le travail réellement accompli par les agents;
- analyser les situations de travail et objectiver les facteurs de risque;
- analyser les conditions d’exposition des travailleurs à ces facteurs de risques;
- identifier les caractéristiques des populations les plus exposées (âge, sexe, fonction, service de rattachement, ancienneté, etc.) et les situations de travail à risque;
- identifier les leviers d’actions les plus pertinents au regard des potentialités économiques et sociales de l’entreprise et mettre en place des modes de prévention adaptés à l’entreprise.
Les conclusions
Le conseiller en prévention, après analyse des entretiens pose ses conclusions en listant les facteurs de risques dans chacune des sphères traitées, pour chacun des niveaux. Il met en évidence les responsabilités dans ces situations problématiques et propose des mesures à mettre en place par l’employeur. Des couleurs seront utilisées allant du vert au rouge pour les situations problématiques à traiter de toute urgence.
En d’autres termes, ces conclusions sont neutres, objectivables et sont décrites de manière impartiales par un professionnel tenu par une code éthique très strict.
Plan d’action
Les mesures proposées seront avalisées par l’employeur et un plan d’action pourra être rédigé.
Si l’analyse démontre une responsabilité dans le chef d’une personne et de comportements problématiques, cette personne se devra de mettre en place un plan d’action qui reprendra les mesures préconisées par le conseiller en prévention, qui rappelons-le remplit ses missions en toute indépendance vis-à-vis de l’employeur et des collaborateurs.
En soi, ce n’est pas dramatique de récolter une analyse désastreuse. Tout le monde ne se fait pas manager en deux jours. On apprend tous de nos erreurs. Mais il est impératif de pouvoir se remettre en question, de faire amende honorable et de rectifier le tir.